C’est le printemps, en Mars… et sur Mars !

C’est le printemps !

Les cerisiers ont mis leur chemisier à fleurs
Les jonquilles s’éparpillent au pied des magnolias
Et les pommiers savants saupoudrent lentement
Leurs pétales de neige

L’esprit de l’air est là
Dans le clair de ces voix d’ondines
Accourant dévalant éclaboussant des cimes
Et vibrant aux éclats : c’est l’eau de la lumière !

dunes polaires dégelant sur Mars

Et puis, c’est aussi le printemps… sur Mars !

Cette photo, superbe, abstraite, énigmatique, montre les dunes polaires d’un sol martien en train de dégeler. S’élevant chaque jour un peu plus dans le ciel de l’hémisphère Nord de Mars, le Soleil fait fondre progressivement la glace d’eau ou de dioxyde de carbone qui recouvre la surface de la planète, laissant apparaître la couleur sombre de son sable basaltique.

En réalité, dans l’atmosphère ténue de Mars, la glace ne fond pas : elle se sublime (c’est-à-dire qu’elle passe directement de l’état liquide solide à l’état gazeux). Là où la couche de givre est la plus fine, le sable sombre qui apparaît accélère même le processus en absorbant davantage la lumière, et donc l’énergie du Soleil. Il semble que de véritables jets de gaz puissent se former occasionnellement, perçant sous la pression accumulée une couverture de glace devenue trop mince par endroits et pulvérisant dans l’air le sable ainsi libéré. Peut-être est-ce l’explication des points noirs arrondis maculant cette mer de sable insolite comme des pores énigmatiques.

Bientôt, les barkhanes sculptées par les vents des saisons passées reprendront librement leur danse inachevée.
C’est le dégel, ici, là-bas, si loin… si proche ! Car l’astre radieux qui l’initie n’est autre que le feu céleste familier des terriens : il est notre étoile commune.

Sœurs planètes, unissez vos ivresses et joignez vos destins !
Dans la flamme de vies infinies,
S’épande la lumière… et le Soleil se lève !

ET

Salutations périhéliaques !

Bonne année solaire à tous !

Aujourd’hui, 3 janvier, la Terre est à son périhélie.

Dans sa rotation autour du Soleil, notre planète ne décrit pas un cercle parfait, mais une ellipse. Il en est de même pour les autres planètes, ainsi que l’a découvert Képler il y a tout juste quatre siècles.
Cela signifie que la distance de la Terre au Soleil varie un peu au cours de l’année. Aujourd’hui, la Terre est au plus proche du Soleil – périhélie ; dans six mois, elle sera dans sa position la plus éloignée – aphélie (comme pour le périgée et l’apogée lorsqu’il s’agit de la distance d’un corps à la Terre, “Gê”, plutôt qu’au Soleil, “Hêlios” 😉 ).

C’est donc un nouveau cycle qui commence, et cette proximité solaire m’offre l’occasion de vous souhaiter à tous… une année–lumière !

Dans l’image ci-dessus, le Soleil point tout juste derrière une Lune éclairée par un clair de Terre légèrement bleuté, dans un balet planétaire que complètent élégamment trois discrets petits points de lumière : Mercure, Mars et Saturne !

Cette année encore, le Soleil, la Lumière, la Vie nous appellent : entrons dans la danse !

ET

Lucky Dube… free again

Lucky Dube, comme bien trop d’artistes reggae avant lui, a quitté hier notre dimension temporelle de manière violente, tué par balles lors d’un braquage dans la banlieue de Johannesburg. Un bandit de petit chemin voulait s’emparer de sa voiture…

Il est probable que certains lecteurs de ce blog (peut-être même la majorité ! 🙁 ) n’aient jamais entendu parler de Lucky Dube. Il est pourtant l’une des figures les plus emblématiques du reggae africain.

À l’époque, son album “Lucky Dube – Captured live” — joli titre, non ? —, m’avait enthousiasmé. Un album au son live vraiment exceptionnel, où il se manifeste une rare énergie, à la fois intense et légère, très ouverte, très belle, que je vous recommande !

Alors je voulais, en passant, saluer le souffle de Lucky Dube, et je saisis cette occasion pour rendre un hommage plus général à cette musique rasta qui résonne de manière à la fois intime et universelle. (Sans doute l’intime véritable est-il toujours universel, et l’universel authentique, infiniment intime…)
La liste des morts tragiques dans le reggae est malheureusement assez longue. Inutile d’en évoquer ici la douloureuse litanie. Elle souligne à l’excès la dure réalité sociale qui soutend aussi cette aventure musicale, par ailleurs d’inspiration spirituelle et mystique.

So long, Lucky, and better luck beside Jah Jah…

Jah live ! For Iver !
ET

Só no Brasil !

Un soir, à Rio, Ipanema, en allant déguster la fameuse pizza capricciosa de chez… “Capricciosa” bien sûr (que l’on m’a si généreusement recommandée), je remonte la rue Prudente de Morais et repère une petite bande de quatre instrumentistes semblant jouer pour les clients d’un restaurant. Quoi de plus ordinaire, me direz-vous ?

Sauf que (comme je le découvrirai plus tard) le restaurant s’appelle « Vinicius », et qu’à Ipanema, cela veut forcément dire quelque chose…

De fait, en m’approchant, je m’aperçois que la bande n’est pas seule à jouer : trois jeunes clients, manifestement eux-mêmes musiciens, ont sorti leur harmonica et ont joint leur talent et leur enthousiasme à l’humeur festive installée par le banjo et les percussionnistes. Magie d’un soir d’octobre. Les convives jouent pour la bande tout autant que l’inverse, dans une même joie partagée. Il n’y a plus que l’onde rieuse de la musique.

Ayant déjà dégusté cette verve tourbillonnante pendant quelques minutes, je saisis mon téléphone portable… pour vous proposer ici (désolé pour la très mauvaise qualité visuelle et sonore) la fin de cette petite scène improvisée ..

Le plan final ne s’invente pas.
Contient-il la clé de cet enchantement ? Clé musicale, bien sûr…

Só no Brasil !

ET

Libérez les avatars !

Voilà, on s’en rapproche de plus en plus : l’établissement d’un standard pour le développement des mondes virtuels tels Second Life, leur interopérabilité, l’apparition d’un web 3D pleinement intégré où les avatars conserveront leur identité en passant d’un environnement à l’autre, comme on se rend dans la ville voisine, et où chacun pourra proposer non seulement son propre environnement dans un monde donné, mais son propre monde au sein d’un métaverse en acte.

Pour ceux qui lisent l’anglais, voici un lien vers un article de Bits (Business, Innovation, Technology, Society) intitulé “Free the Avatars”, faisant état des réflexions avancées par Second Life et IBM à ce sujet, lors de la Virtual Worlds Conference and Expo à San Jose (Californie).

Si tout ceci n’évoque rien pour vous, vous pouvez jeter un coup d’œil à ce billet, publié ici-même en janvier dernier. Et peut-être serait-il temps de commencer à s’y mettre, si ce n’est déjà fait… 😉

Second Life, ce n’est pas une deuxième vie (qui serait évidemment plus pauvre que la “première” à maints égards – mais pas tous ;-)), tout comme Internet n’est pas un autre monde. C’est un élargissement, donc un enrichissement du monde “ordinaire”. On peut aimer son trottoir et ne pas s’abstenir de traverser la rue…

Les voyages forment la jeunesse !

ET

« Qui suis-je ? »

[ Petite suite au billet d’hier
On ne veut pas manquer un visiteur, mais attention à ne pas se manquer soi-même ! 😉 ]

Qui suis-je ?

N’avez-vous jamais trouvé étrange cette continuité de l’être ?
Comment se fait-il que j’aie à chaque instant l’impression d’être le même que l’instant précédent ? Et d’ailleurs, est-ce bien vrai ? Est-ce bien vrai que je suis le même qu’il y a un instant ? Et même, est-ce bien vrai que j’ai l’impression d’être le même qu’il y a un instant ?

En fait, je n’ai véritablement cette impression que si j’y prête attention. Sinon, je ne sais même pas qui je suis ! Et quand j’y prête attention, alors ce « moi » que je suis m’apparaît tout de suite très différent du « moi » que je suppose naïvement être quand je n’y prête guère attention.
Quand je dis « c’est moi », ou « je suis moi », qui est ce « moi » ? Et surtout, qui est ce « je » qui cherche ainsi à s’identifier ?

En physique quantique, les questions de ce genre (que pose traditionnellement la physique classique ou la pensée analytique, toutes deux réalistes en un sen naïf) n’acquièrent un sens qu’au moment où la réponse est donnée. La définition d’un attribut n’a de sens que lorsque l’attribut se manifeste. Or il ne se manifeste par définition que dans la manifestation, et alors il n’est plus simplement l’attribut, mais l’attribut manifesté.

Identifier la manifestation d’une chose n’est pas identifier la chose elle-même, bien évidemment. La Physique classique admet implicitement que les choses peuvent être décrites comme l’ensemble de leurs attributs, et par un glissement hasardeux – ou parce qu’elle ne s’interroge pas véritablement sur la chose, mais seulement sur sa manifestation, i.e. le phénomène –, elle finit par adopter l’idée que les choses sont l’ensemble de leurs attributs (incluant leurs attributs constitutifs connus ou inconnus, et la manière dont elles se comportent par elles-mêmes ou en liaison avec leur environnement). Mais ce que la Physique a découvert il y a près d’un siècle, c’est qu’il n’est en réalité pas possible de relier directement les « attributs manifestés » des choses à ce qui serait des attributs plus intrinsèques. Des notions aussi élémentaires que la position, la masse, l’énergie, l’instant considéré, ou même le nombre de constituants (particules), se sont avéré n’être pas pertinentes à un niveau plus profond de l’étude de la réalité, à commencer par celui de la Physique quantique. Par exemple, demander si un électron est « ici » ou « là », c’est plaquer sur cet électron une catégorie – celle de la localisation spatiale – qui lui est étrangère, qui ne peut le saisir ou l’englober. Une expérience spécifique peut certes le localiser, le « manifester » ici ou là, mais cet électron-manifesté n’est pas l’électron, et il y a discontinuité totale, radicale, entre telle manifestation de l’électron et telle autre.

Techniquement, cette difficulté est traitée par la Physique par le biais du formalisme probabiliste, qui a le mérite de délimiter lui-même son champ de validité et d’effectivité. Mais cela n’a pas d’importance à ce niveau. Le message essentiel est ici qu’on ne peut jamais définir une chose ou l’identifier par ses attributs manifestés ou la manière dont elle se comporte.

Identifier un objet, une situation, un phénomène, s’avère au bout du compte aussi délicat qu’identifier un être. Normal : « identifier », c’est justement reconnaître l’être derrière la chose – entendons par là « reconnaître ce que la chose est ». Et cela implique de reconnaître d’abord que cette chose est, pour ensuite, en tant qu’elle est, apprécier la réalité qui conditionne ou justifie ses modes d’êtres.

C’est en ce sens qu’on indiquait plus haut que le réalisme de la Physique classique ou de la pensée analytique ordinaire est naïf. (NB : attention, cela n’implique pas qu’il faille renoncer au réalisme, mais à la naïveté quant au réalisme.)

Mais qu’entend-on au juste par « identifier » ?

Identifier, c’est reconnaître comme identique ce qui était préalablement distingué. C’est soit, à un première niveau, rapporter de l’inconnu à du connu (réaliser que « ceci », qui était à identifier, n’est en fait rien d’autre que « cela », déjà identifié), soit, à un autre niveau, accéder à une description ou une perception qui « résout » la distinction, par un processus qui consiste le plus souvent (et paradoxalement) à élucider le « connu » en « inconnu », et à reconnaître alors que deux inconnus distincts sont en réalité identiques, une seule et même entité. Les deux processus contribuent conjointement au progrès de la connaissance, en Physique comme ailleurs. (L’accession à la réalité quantique, ou à la réalité relativiste du monde physique, sont deux exemples du second processus ayant opéré en Physique.)

On estime souvent que l’indéterminé est plus vaste que le déterminé. Mais la vérité est plus radicale encore. L’indéterminé est d’une nature autre. Ce n’est pas la simple collection des possibles, ou l’un quelconque (et inconnu) des possibles. La détermination crée le déterminé.

Mais pour en revenir à la question initiale et générique – « qui suis-je ? » –, l’identification qu’elle appelle a toutes les chances de soulever les mêmes difficultés foncières que l’identification d’une chose ou d’un objet quelconque. Il n’est sans doute que temps pour l’Homme de dépasser le réalisme naïf de « l’Homme classique » (celui de la Physique classique), qui serait appréhendable par ses manifestations et sa participation (aussi complexe soit-elle) au monde physique ordinaire – classique, donc –, dont on sait bien désormais qu’il n’a d’existence que dans la représentation naïve que nous avons de l’expérience physique effective, qui est en dernière analyse une expérience conscientielle – ou, pourrions-nous même dire, « sensible donc conscientielle ».

S’identifier soi-même, dès lors, serait appréhender l’être derrière la manifestation de l’être. Ce serait donc appréhender non seulement la similitude, mais l’identité réelle de ce qui apparaît ou se manifeste comme distingué. Et cela résoudrait tranquillement le problème de la continuité de l’être, posé initialement. « Suis-je le même qu’il y a un instant ? » Oui, si je suis ce que je suis réellement, si « je suis » est l’identité–même de l’être, et non sa manifestation, changeante, méconnaissable, discontinue et transitoire. Non, si « je suis » est identifié à la projection de cet être dans la réalité classique, à la faveur d’une expérience, d’une interaction, d’une réalisation particulières. De même que l’électron est ici ou là (a telle énergie ou telle vitesse, etc.) seulement s’il est considéré du point de vue classique – dans sa « fixation » dans le monde physique classique – et cesse du même coup d’être ce qu’il est réellement, de même je suis ceci ou cela, comme ceci ou comme cela, seulement si je m’identifie à ma projection dans l’échevau des interactions ordinaires, des phénomènes classiquement manifestés. Ce faisant, je me « fixe », et perd toute continuité à la fois avec le monde quantique qui sous-tend ne serait-ce que les molécules qui composent mon corps, et avec la fixation précédente et la fixation suivante de ma personne. En un mot, je m’extrais de la continuité, du continuum de mon être même : je cesse d’être.

(Bon, allez, je vais retourner voir si quelqu’un m’attend devant ma porte 😉 )

ET

En toute logique… (suite)

(Petite suite au billet d’hier…)

Hier, en fin d’après-midi, après avoir posté mon petit billet sur l’usage de la logique, j’ai décidé d’aller boire un verre au café d’en face. Mais comme je ne voulais pas manquer un éventuel visiteur, j’ai laissé un mot sur ma porte : « ET est au café d’en face ».

Je ne bois guère d’ordinaire, mais il se peut que je devinsse un peu saoul. Je décidai finalement de rentrer chez moi, et en arrivant devant ma porte, je vis le mot et me dis : « Ah vraiment, cet ET, toujours en vadrouille ! ».

Je retournai donc au café d’en face, et demandai si quelqu’un savait par hasard où se trouvait ET.

« Mais, c’est vous ! », me répondit-on.

« Ah, c’est moi… », répondis-je perplexe. « Bon, alors il faut que je me dépêche de rentrer, parce qu’il y a quelqu’un qui m’attend devant ma porte ! »

ET

En toute logique…

Certains font de la logique le critère absolu de la vérité. D’autres s’en méfient à juste titre : rien ou si peu, dans le comportement des hommes, obéit à la logique, et supposer que les événements se conformeront à ce qu’on peut en attendre « logiquement » est le moyen le plus sûr de se fourvoyer. En fait, compte tenu de ce que l’on peut observer du comportement humain et de l’ensemble des événements afférents à la sphère humaine, il est totalement illogique d’attendre que nos déductions logiques soient génériquement justes.

Pourtant la logique elle-même n’est nullement en cause. Le problème vient toujours des prémisses (des axiomes, diraient les mathématiciens). Toute déduction logique part d’un présupposé – ou d’un ensemble de présupposés –, qui peut être juste… ou non ! S’il est juste, la déduction est correcte. S’il est faux, ou simplement incomplet, la déduction peut être juste ou fausse : c’est imprédictible !

Si les données sont incomplètes et insuffisantes, la logique peut toujours s’appliquer et demeurer valable en elle-même, mais elle ne constitue pas un critère de vérité.

Or la complexité du monde est telle que nous n’avons jamais accès qu’à des données incomplètes, et nous avons donc développé une certaine aptitude à inférer des « vérités probables » ou potentielles, à partir d’informations limitées. Cette aptitude est précieuse et même indispensable, car si nous exigions de disposer de l’ensemble des tenants et des aboutissants pour prendre la moindre décision, effectuer le moindre choix, accomplir la moindre action, nous serions inévitablement et à jamais condamnés à l’inactivité et à l’immobilisme – y compris en pensée !

Les conditions de notre existence impliquent donc que nous travaillions à partir de données incomplètes, et cette nécessité est sans doute l’habitude la plus commune du fonctionnement cognitif humain. Mais il serait pour le moins hasardeux d’imaginer que la nécessité–même de ce fonctionnement nous exonère de plein droit de ses conséquences fâcheuses. Si l’on me donne un objet de 200 kilos à tenir dans mes bras, le fait que je sois obligé de finir par le lâcher n’empêchera pas qu’il tombera bel et bien dès que j’aurai cessé de retenir sa chute !

Il ne s’agit donc de blâmer ni la logique, ni l’incomplétude des prémisses, mais plutôt de mettre fin à la supposition implicite que nous en savons assez sur les conditions d’une expérience pour inférer en toute logique la nécessité de ses résultats.

Car la complexité du monde est également telle que des situations apparemment semblables peuvent être en réalité très différentes du point de vue d’une inférence particulière. Si je lâche finalement cette grosse masse que je tenais dans mes bras, il se peut aussi qu’elle n’atteigne pas le sol – par exemple si elle est en fer et qu’un aimant puissant se trouve disposé sous le sol. « Information incomplète, déduction incertaine. »

Pour parvenir à évoluer dans un environnement inaccessible à la connaissance exhaustive, nous avons l’habitude de travailler à partir de probabilités. Compte tenu des informations que l’on a et de notre expérience, il est fortement probable que telle action produise tel résultat, ou qu’untel se comporte de telle façon – c’est-à-dire à moins que n’intervienne quelque chose d’inattendu et dont je n’ai pas connaissance, ou quelque chose de rare, que je n’ai pas encore rencontré, ou dont l’expérience ne m’est pas familière.

Pour ne pas être trahis, et parfois lourdement affectés par l’inexactitude occasionnelle de ces inférences probables, il convient à la fois d’élargir le champ de nos expériences et d’affiner notre perception des conditions susceptibles d’influer sur les situations (en un mot d’accroître notre connaissance), mais aussi parallèlement de prendre conscience des limitations qui leur sont inhérentes.

L’erreur consiste naturellement, partant de la répétition et de l’usage abusif du raisonnement, à ériger le probable en certain, et l’improbable en impossible. Cette remarque de Sherlock Holmes au cher Docteur Watson, qui venait d’éliminer une à une toutes les possibilités logiques relatives à une mystérieuse affaire, est éloquente : « lorsque tous les possibles ont été réfutés, l’impossible devient probable » !

Logiquement perplexe,

ET

Le feu des cimes

[22 avril 2007, Malargüe, Provincia de Mendoza, Argentina]

Extase céleste

Parfois, au soir comblé de vérités infuses, la force vive et sûre des paysages andins explose en saisissants hommages à la majesté.

Vibrant des milliers de ruisseaux, torrents, rios alimentés par l’aube et nourris au cristal de leurs flancs enneigés, les Andes ressuscitent un langage secret, précieux par son intimité magique, et, reflétant aux cieux des ors insoupçonnés, emplissent de puissance la sérénité.

Et les arbres s’embrasent, et l’on en voit les flammes exhausser la matière sans la consumer. Extase ! Telle est l’extase en vérité : un feu dans l’âme inoffensif au corps, un peu de Ciel mystique aux cieux astronomiques… Nonobstant la matière – le tronc, le bois, hulê ! –, un buisson ardent ! (Ô, sceau des déités humaines !)

Ô soir immense, jouvence, sommité !
Nous avons bu ton ciel et ta présence
Et nous y sommes inclinés

Tant de questions s’évanouissent en ces rivières de clarté.

Ce soir, après maints débats engourdis entre physiciens, ici, en Argentine, où nous tentons d’interpréter les messages transmis par les « rayons cosmiques ultra-énergétiques » dont nous détectons les effets dans le ciel translucide de la Pampa Amarilla, il apparaît clairement que la “précision scientifique” auto-référente est un obstacle à la pensée.

Et à la Vie !

On ne devrait jamais répondre avec précision aux questions posées de manière imprécise. Leur richesse réside si souvent dans cette imprécision même : gardons-nous de les appauvrir !

ET

Le virtuel prend corps

Le web traditionnel, c’est terminé !

C’est du moins ma conviction, après avoir exploré quelque peu les possibilités de l’univers virtuel de Second Life. La révolution de ce qu’on pourrait appeler le « virtuel spatialement organisé » est inéluctable. Ses conditions d’émergence sont déjà réunies : l’accès à un monde véritablement tridimensionnel, largement configurable et dans lequel la création d’objets, de paysages et d’animations est d’une simplicité qui ne peut d’ailleurs qu’aller en augmentant ; et bien évidemment la capacité de s’y mouvoir à sa guise et d’ajuster son point de vue pour privilégier tantôt une vue d’ensemble, tantôt une vue rapprochée sur un élément particulier, pour l’observer, le jauger, le lire – tout cela de manière continue, fluide, à volonté…

Oui, on peut aussi « lire » au sens propre, et c’est cela qui fait que le web traditionnel est en réalité déjà inclus (du moins en principe) dans un univers virtuel tel que Second Life (SL pour les intimes – Deuxième Vie pour… je ne sais pas qui). Car parmi les objets 3D construits dans un monde en 3D, rien n’empêche évidemment de faire figurer un « bête » plan (un mur, un écran, une table, une affiche, un tableau, un livre) sur lequel on peut reproduire n’importe quelle image ou écrire n’importe quel texte (même en temps réel). Tout ce que vous trouvez sur n’importe quel site web, quel que soit sa complexité ou son degré d’élaboration, peut donc se retrouver à l’identique, de la manière la plus triviale et la moins créative possible, dans un univers virtuel en 3D.

Mais les possibilités offertes par un tel monde sont bien plus vaste : l’avenir (proche) le démontrera… en le montrant !

Je ne me lancerai donc pas ici dans un argumentaire – à quoi bon perdre du temps dans une entreprise aussi dérisoire : allez donc jeter un coup d’œil dans SL, et vous verrez 😉

L’organisation d’éléments (d’une certaine forme ou d’une certaine nature) dans un espace est le point de départ de toute pensée, de tout raisonnement, de toute transmission/apprentissage. Tous les espaces ne sont pas des espaces géométriques, bien sûr, au sens où les points y sont des lieus, des endroits, entretenant les uns avec les autres des rapports d’un type très particulier (reposant sur la notion de distance), tandis que les « objets » se caractérisent par une étendue, une forme et une orientation. Mais ces espaces géométriques nous sont si familiers que leur utilisation nous est d’emblée extrêmement naturelle, « immédiate ». Et dès lors, la supériorité des espaces tridimensionnels sur les espaces bidimensionnels relève de l’évidence.

Si l’introduction et la maîtrise de la perspective ont joué le rôle que l’on sait dans l’histoire de l’art et de la représentation socio-culturelle de l’espace, c’est bien parce que l’introduction d’une troisième dimension ouvre naturellement toutes sortes de… perspectives, justement ! Mais la perspective dans un tableau, sur une image ou sur un écran, reste au niveau de la 2D : rien ne « sort » de la toile, qui est plane, et les parties cachées des objets le demeureront à jamais. C’est le peintre qui choisit le point de vue : pas très « participatif », tout ça ! 😉

Bref, la capacité d’organisation (ne parle-t-on pas également d’architecture de la pensée ?) des objets/concepts/idées/mots/images dans un espace géométrique, situatif, et la capacité associée de rendre manifeste les rapports que ceux-ci entretiennent entre eux, sont évidemment bien supérieurs dans un espace à 3D que dans un espace bidimensionnel : il ne viendrait à personne l’idée de contester l’intérêt de la 2D – de l’image – par rapport à la 1D toute linéaire, et a fortiori de la 0D – un simple point, où tout est donc superposé et confondu ! (C’est d’ailleurs sans doute la considération du 0D, où rien n’est « distinguable », qui fait le mieux ressortir l’intérêt, voire l’essence de la spatialisation…)

[NB : si la perspective permet d’introduire la profondeur sur un plan bidimensionnel, qu’on y songe un peu : dans un espace 3D, la perspective, ce serait de la 4D… Voilà du nouveau pour la perception, la compréhension et la conscience !]

Mais revenons au web traditionnel – c’est-à-dire le vieux web, celui d’aujourd’hui. Si je considère qu’il sera rapidement dépassé, dans la grande majorité de ses usages, c’est aussi parce que ma courte expérience du monde virtuel de Second Life a suffit à rendre ma navigation sur Internet un peu frustrante, gauche : je voudrais zoomer, changer de point de vue, passer derrière, voir des objets et non des images. Et puis, il ne faut guère plus de quelques minutes d’interaction avec des avatars de SL pour comprendre la puissance incontournable qu’offre la localisation, fût-elle virtuelle. Les avatars, ce sont ces corps virtuels – au sens propre si je puis dire ! – qui ont en effet tous les attributs d’un corps, qui sont animés par votre conscience, votre volonté, bref, qui sont ni plus ni moins ce qu’est votre corps biologique dans ce monde (disons le monde physique ordinaire).

La nouveauté cruciale, la voici. Quand vous surfez sur le web, quand vous « tchatez » avec un ami ou que vous envoyez un courriel, vous êtes dans un monde virtuel qui offre un avantage extraordinaire : une connexion quasi-instantanée entre des éléments d’information et/ou des personnes localisées en des points différents de l’espace ordinaire, d’un bout à l’autre de la planète. Sur le web, les rencontres existent et sont possibles indépendamment de la position géographique des interlocuteurs ou des serveurs informatiques hébergeant les données informatiques consultées. C’est remarquable, parce que ce monde virtuel – le cyberespace – est délocalisé. Mais justement… il est délocalisé ! Par essence, donc, on perd un élément : la localisation !

Et c’est cela que Second Life (ou d’autres mondes de ce type) corrige, réalisant une localisation délocalisée, offrant les avantages de la délocalisation physique (l’essence du vieux web), mais permettant la spatialisation des interactions. Car en plus d’offrir un environnement 3D utile pour l’organisation des informations et la manipulation d’objets de type familier (mais pouvant remplir des fonctions très diverses), SL offre une localisation effective. Virtuelle, mais… si j’ose dire… bien réelle !

Une discussion dans Second Life est ainsi toujours associée à un lieu : vous êtes à la montagne, ou bien à la mer, le Soleil se couche, il fait nuit, au moment où votre interlocuteur vous dit telle chose, un oiseau passe, une vague se brise sur le rivage. Vous pouvez être en conversation avec une amie à 7 000 km de vous, mais vous êtes là, bel et bien, dans un même « lieu ». Dire que ce lieu est virtuel n’a pratiquement aucun sens, d’ailleurs : tous les lieux ne le sont-ils pas, au fond ? Plus tard, en repensant à votre conversation, vous vous souvenez de l’ambiance, de la lumière, de tel événement survenu indépendamment de vous, le passage d’un goéland, le passage près d’un cyprès agité par le vent… Vous êtes dans un monde. Vous êtes localisé. Et lors de votre prochaine rencontre, vous vous souviendrez de ces éléments du « décor », de ces « scènes », de ces contingences !

Et même si vous ne faites que consulter une « bête page web », le faire dans tel lieu à votre goût plutôt que dans tel autre relève maintenant (ou relèvera très bientôt) de votre choix, de votre « liberté environnementale » en quelque sorte.

Voilà pourquoi la prédiction d’une fin progressive mais rapide du web traditionnel est aisée. Pour le résumer en une image claire, je dirais que l’arrivée de la 3D effective, situative et paysagée dans le cybermonde va supplanter le web traditionnel non situé et bidimensionnel (des pages et des images planes) de la même manière que l’interface graphique de Macintosh avec ses fenêtres et ses icônes géométriquement situées dans un plan a relayé l’interface à ligne de commande unidimensionnelle.

Bien sûr, il y a et il y aura toujours des gens utilisant les lignes de commande, qui sont mieux adaptées pour certaines opérations techniques bien spécifiques. Mais cet usage est très limité en pratique et en étendue (il est même probable que certains lecteurs de ce blog ne sachent pas de quoi il s’agit !), et il ne fait pas le moindre doute que la révolution de l’Internet n’aurait jamais eu lieu si les ordinateurs domestiques utilisaient les lignes de commande. Je vous laisse donc extrapoler à la dimension supérieure…

Tiens, ne viens-je pas d’utiliser une expression éloquente ? « Avoir lieu »… Si « avoir un lieu » a pris la signification de « se produire », « exister réellement », ce n’est assurément pas un hasard !

Alors, à bientôt dans Second Life : le virtuel prend corps, ne restez pas sans avatar !

Tenez, d’ailleurs, qu’est-ce qu’un corps ?
Très bonne question ! Mais on en parlera une autre fois… 😉

ET

PS : Les Humains Associés viennent d’ouvrir leur île dans SL : « l’Ile Verte », une merveille ! Lieu de paix, forum humaniste, scientifique, poétique, culturel, humanitaire, bref, tout « Les Humains Associés » spatialisé dans l’u-topie de leur vision intemporelle…